Soyez actifs et vulnérables plutôt que doux et faibles 
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Soyez actifs et vulnérables plutôt que doux et faibles 

Service : Participation et Revendication Publics : Particulier, Pouvoir public, Professionnel Thématique : Mobilité piétonne temps de lecture 4 min 27 sec

Depuis que le monde a commencé à prendre conscience que la voiture ne devait plus être considérée comme l’unique solution en termes de mobilité, on a donné des petits noms à ces “nouveaux” types de mobilité et à leurs usagers. Enfin pas si nouveau que ça, parce que marcher (et faire du vélo), ça a toujours existé en fait (même bien avant la voiture). Mais disons que ce n’était pas trop dans le top des priorités de nos politiques et aménageurs de l’espace jusqu’il y a peu. 

On a donc commencé gentil par la “mobilité douce” et un peu peureux avec les “usagers faibles”. 

Les années 2000 durant lesquelles le terme mobilité douce s’est imposé ont été marquées par les préoccupations environnementales, en particulier le changement climatique. La douceur à laquelle il est fait référence attire l’attention sur le faible impact écologique de la marche comme du vélo : peu de ressources pour produire chaussures et bicyclettes, pas de consommation de carburant, peu de surface pour se déplacer ou garer les vélos et faibles émissions polluantes et de gaz à effet de serre (Mobilité Piétonne Suisse). Ce qui pourrait être un peu nuancé maintenant qu’ils se développent car tant les cyclistes que les piétons ont besoin d’espace pour se déplacer de façon agréable, pratique et sécuritaire.   

La mobilité douce, c’est donc un concept un peu flou qui désigne l’ensemble des déplacements non motorisés, à savoir la marche à pied, le vélo (et tous les dérivés), le roller… mais aussi les bus roulant au gaz naturel, les tramways silencieux ou tout autre mode de transports dit respectueux de l’environnement et du cadre de vie urbain. (Coredem 

Maintenant que la prise de conscience est bien engagée et même si la partie n’est pas encore gagnée pour trouver un meilleur équilibre, notamment en termes d’occupation de l’espace, entre tous les usagers, il nous semble important de remettre les points sur les i, les virgules aux bons endroits, le bon pied dans la bonne basket, … Enfin donc d’utiliser les bons mots, ceux qui définissent, identifient et valorisent correctement les personnes concernées. Parce que les piétons, c’est des gens comme vous et nous (c’est même vous et nous) ! 

15 ans après l’apparition du concept de mobilité douce (vers 2010 en Belgique car il parait qu’on est des précurseurs en la matière), les problèmes causés par la sédentarité, notamment la surcharge pondérale voire l’obésité, constituent un nouvel enjeu de société. Le milieu de la santé s’y est intéressé plus rapidement que les professionnels de l’aménagement et de la mobilité (Mobilité Piétonne Suisse).  

Néanmoins, une étape est franchie, les concepts de mobilités actives et de modes actifs, issus de l’anglais active mobility, font leur apparition.  

Les modes actifs désignent exclusivement les modes de déplacement faisant appel à l’énergie musculaire, telle que la marche à pied et le vélo, mais aussi la trottinette (pas électrique hein, bien essayé mais on vous voit), les rollers, les chaises roulantes non motorisées (et oui même les personnes à mobilité réduites sont actives !) … (Ademe et Coredem). Vus les différents modes concernés, on parlera donc de mobilités actives et modes actifs au pluriel. 

La différence est ici faite entre les moyens de transports passifs, qui nous mènent quelque part sans devoir faire d’effort physique et ceux pour lesquels nous devons solliciter notre énergie et nos muscles pour avancer (Mobilité Suisse Piétonne).  

Il en va de même pour les termes usagers faibles et usagers vulnérables. Le piéton est loin d’être faible quand on voit toute l’énergie qu’il dépense pour se déplacer. Par contre il est clairement le plus vulnérable lors de sa rencontre accidentelle avec d’autres types d’usagers comme les cyclistes, les conducteurs… Le principe STOP récemment adopté en Wallonie et déjà existant à Bruxelles et en Flandre, consacre d’ailleurs cette base que le piéton doit être au point de départ et au centre des réflexions et aménagements quand il s’agit de mobilité. 

Les modes actifs, et plus particulièrement la marche et les piétons, sont la solution pour effectuer des trajets de courtes distances dans les centres urbains et leurs périphéries (moins de 2km pour la marche). Il sont aussi incontournables à une mobilité intermodale, c’est-à-dire qu’ils sont l’élément essentiel de la liaison entre les lieux de départs, de destinations et les transports collectifs (bus, tram, train, métro) et autres solutions alternatives à la mobilité automobile (covoiturage, autopartage, vélo en libre-service…). Leur rapidité et leur flexibilité dans ces cas précis, sont bien mieux reconnues et plus en phase avec le terme actif que la douceur évoquée dans mobilité douce. La priorité à leur accorder est enfin reconnue, il ne s’agit plus de leur faire une petite place parce qu’ils sont doux et faibles. 

Nous ne marcherons désormais plus sur des œufs quand il s’agira de qualifier les piétons et leur mobilité. Nous sommes toutes et tous piéton·nes, nous sommes toutes et tous actifs !