La chromorientation : Késako ?
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La chromorientation : Késako ?

Services : Expertise et Consultance, Participation et Revendication Publics : Particulier, Pouvoir public, Professionnel Thématique : Mobilité piétonne temps de lecture 4 min 44 sec

Et si à pied ce n’était pas si loin…

La transition vers une mobilité plus durable basée sur la complémentarité des modes actifs (marche, vélo, etc.) et collectifs (transports en commun) nécessite d’initier une dynamique de changement de comportement de la population. L’un des critères déterminant de choix modal (le choix des personnes du/des mode(s) de déplacement utilisé(s) au quotidien) étant le temps de parcours, les autorités publiques doivent tout faire pour faire prendre conscience aux usagers que « certaines choses ne sont pas si loin qu’ils le pensent ». La marche peut permettre de s’y rendre, plutôt que d’utiliser sa voiture ou même de saturer les transports en commun. Un des leviers est donc de proposer une signalétique claire et simple aux piétons pour l’inciter à la marche à pied.

Oui mais par où ?

Au-delà des signalétiques piétonnes traditionnelles, d’autres plus novatrices se développent en parallèle, comme la chromorientation par exemple. Mais de quoi s’agit-il exactement ?

Bienvenu sur le dancefloor de l’orientation des piétons. Littéralement, il s’agit de l’orientation (des piétons) par un code couleur. Développé par deux chercheurs du Cerema (centre de recherche français travaillant notamment sur la mobilité) Patrick Palmier et Joël Meissonnier, ceux-ci proposent de se défaire du système traditionnel de jalonnement imposant chemin “ tout prêt à suivre” pour un nouveau système axé sur l’orientation des piétons avec un choix de l’itinéraire à emprunter. En effet dans un contexte de ville dense, le système traditionnel est encore souvent basé sur les mêmes logiques que les panneaux routiers et donc non adapté aux placements piétons, bien souvent ne s’adressant qu’à un objectif touristique, tout en rendant ceux-ci relativement prisonnier d’un itinéraire, certes pensé pour lui, mais à sa place.

“En milieu urbain dense, elle rend l’utilisateur relativement prisonnier d’un itinéraire, certes pensé pour lui, mais à sa place. Le constat est alors sans appel : les dispositifs de jalonnements pour piétons ou cyclistes existants sont pour la plupart des copier-coller de panneaux routiers contribuant implicitement à asseoir le postulat infondé selon lequel cyclistes et piétons s’orienteraient de la même manière qu’un automobiliste. C’est ainsi qu’est née la « chromorientation ». Il s’agit d’une proposition de jalonnement innovante et respectueuse des logiques de mobilité des piétons et cyclistes en ville dense. Elle consiste à ajouter des informations chromatiques au sommet des potelets situés à toutes les intersections viaires (voies publiques) d’une ville-centre dense et maillée. Les pastilles colorées livrent moins un « prêt à suivre » que des directions générales qui pointent vers des lieux emblématiques situés à la périphérie du centre urbain dense : portes, pôles d’échanges ou carrefours bien connus.”

Après la théorie, la pratique ?

A l’heure actuelle, aucune réalisation n’est effective mais les chercheurs ont travaillé sur le territoire de la ville de Lille pour imager leur proposition. “Douze couleurs sont associées à 12 destinations périphériques emblématiques et les arcs de cercle portant une couleur sont orientés vers la destination correspondante. Pour optimiser leur lisibilité, les couleurs chaudes sont privilégiées pour indiquer le sud et la couleur verte est utilisée lorsque le toponyme fait référence à un parc ou une zone arborée (…) En plus des 12 destinations emblématiques, la pastille indique le nord et une flèche pointe vers la place de la République, place centrale bien connue à Lille. Sur cette pastille, la couleur associée à la gare Lille- Europe est prépondérante parce que cette destination est très proche, alors que celle associée au Centre Hospitalier (CHR) occupe très peu de place parce que cette destination est éloignée.

Les repères sont à positionner partout en ville, se matérialisant sur le terrain, par des potelets équipés d’une rosace d’orientation et installés à chaque intersection de rues. 

Chromorientation : Vers un dispositif de jalonnement complémentaire à destination des piétons et cyclistes ? Joël Meissonnier, Patrick Palmier

 

La chromorientation ne dispense donc pas d’utiliser une carte ou d’un système GPS pour trouver une adresse précise. Par contre elle vous garantit que vous êtes engagé dans le bonne direction. Elle n’a pas d’intérêt non plus pour les cyclistes ou piétons qui réalisent un déplacement routinier bien connu. Elle vise le fait de devoir fournir moins d’effort cognitif de repérage et d’orientation. Déjà savoir plus ou moins vers où on va c’est pas si mal. Elle permet aussi de se lancer à travers des quartiers où il existe un réseau de voiries dense que l’on ne maîtrise pas bien et qui sont pourtant plus calmes et que les vitesses des véhicules y sont apaisées.

À noter par ailleurs qu’en Belgique nous avons, dans le même ordre d’idée les réseaux de points-noeuds, qui démultiplient les arbitrages possibles et permettent ainsi de composer son propre itinéraire.

Cela pourrait-il donner des idées à des villes belges ? En tout cas, Tous à Pied est chaud comme un Saterday night fever 💃🕺 pour développer ce type de solution de mobilité piétonne en Wallonie et à Bruxelles. N’hésitez pas à contacter nos experts sur la questions.

Sources: Chromorientation : Vers un dispositif de jalonnement complémentaire à destination des piétons et cyclistes ? Joël Meissonnier, Patrick Palmier