ONHAYE - Falaën : la rue des Framboisiers est bien une voirie communale
Article | Etude de cas |

ONHAYE - Falaën : la rue des Framboisiers est bien une voirie communale

Service : Participation et Revendication Publics : Particulier, Pouvoir public temps de lecture 4 min 34 sec

La vallée de la Molignée est une région courue par les amateurs de balades. Les abbayes de Maredsous, de Maredret, les ruines de Montaigle, les villages typiques de Falaën ou de Sosoye… Nos amis des Sentiers de Grande Randonnée proposent d’ailleurs une belle randonnée en boucle dans leur topoguide « Randonnées en boucles dans la Province de Namur ».

Le point de départ de cette boucle se situe sur le parking de l’abbaye de Maredsous. Assez rapidement, après avoir quitté Maredsous, le topoguide vous invite à rejoindre le centre du village de Falaën via la rue des Framboisiers (prolongée sous le nom de la rue de l’Ermeton). Or, une fois arrivé à l’entrée de cette rue, un panneau routier C3 avec la mention « Privé » ou « Chemin privé » indique que l’on n’y est manifestement pas le bienvenu. Alors ? Cette rue est-elle publique ou privée ? Peut-on y limiter le droit de passage ?

Rue privée ou publique ?

D’après les riverains, l’assiette du chemin est privée et se compose de six parcelles cadastrales distinctes. Cela ne semble contesté par personne. Ni la commune, ni les habitants, ni les associations de marcheurs. Cependant, le public y passe sans interruption depuis des décennies sans que cela ne pose problème jusqu’à ce que certains riverains décident d’en dissuader le passage, parfois avec menaces, au grand dam des autres habitants et des randonneurs. A un tel point que des plaintes ont été régulièrement déposées à la commune d’Onhaye depuis 2013.

L’assiette de la rue est donc privée, mais cela ne signifie nullement que la voirie n’est pas une voirie communale. En effet, l’arrêt de la Cour de Cassation du 20 mai 1983 stipule que « un droit de passage peut être acquis en tant que ‘servitude légale’ d’utilité publique au profit des habitants d’une commune et de tous les intéressés par un usage trentenaire continu, non interrompu, public et non-équivoque d’une bande de terrain, par chacun, à des fins de circulation publique, à condition que cet usage ait lieu avec l’intention d’utiliser cette bande de terrain dans ce but et ne repose pas sur une simple tolérance du propriétaire du terrain ; cette règle vaut indépendamment de tout acte administratif formel de la Commune, encore qu’un tel acte puisse contribuer à prouver l’intention ».

L'obstacle en béton a été placé pour éviter que les eaux de pluie ne s'écoulent en contrebas, mais ce n'est pas l'aménagement le plus adéquat pour les usagers doux - @ Sentiers.be
L’obstacle en béton a été placé pour éviter que les eaux de pluie ne s’écoulent en contrebas, mais ce n’est pas l’aménagement le plus adéquat pour les usagers actifs.
A l’avant : le nouveau revêtement, à l’arrière, l’ancien…

 

Il s’agit du mécanise de prescription acquisitive prévu à l’article 2229 du Code civil qui verse ce chemin dans l’ancienne catégorie des voiries innomées. Ce mécanisme est intégré via les articles 27, 28 et 29 au nouveau Décret relatif à la voirie communale du 6 février 2014. Malgré le fait que l’assiette soit privée, le chemin est grevé d’une servitude publique de passage et est donc bien une voirie communale au sens du nouveau décret.

Peut-on y limiter le droit de passage ?

Par le passé, un revêtement a été posé sous forme d’asphalte et l’on constate également qu’il y a des poteaux d’éclairage public. Certains riverains arguent du fait qu’il ont eux-mêmes entretenu la voirie depuis lors, notamment en faisant poser un nouveau revêtement, pour en décider qui pouvait ou ne pouvait pas passer.

Des panneaux C3 (accès interdit, dans les deux sens, à tout conducteur) ont été placés à divers endroits. S’ils ont été placés par les riverains, ces panneaux sont illégaux car seul un règlement complémentaire de circulation routière adopté par le conseil communal et approuvé par le Gouvernement wallon peut autoriser le placement de ce type de panneau sur une voirie communale. De même, la mention « Privé » peut avoir un effet dissuasif en laissant croire que la voirie est interdite au public, même si la mention « Entrée interdite » n’est pas présente.

Il s’agit d’une voirie communale et donc, seule la commune peut en réguler l’accès à tel ou tel type d’usager. Et contrairement à l’avis d’un riverain, si la voirie est légalement accessible au public, et en particulier aux piétons, il ne peut y avoir de limitation quant à la quantité de personnes autorisées à passer. Que vous soyez un simple promeneur solitaire ou que vous participiez à une marche ADEPS n’y change rien.

Conclusion

La rue des Framboisiers est une voirie publique accessible aux usagers non-motorisés. La commune l’a bien signifié aux riverains. Pour en limiter l’accès aux véhicules à moteur et préserver la tranquillité de ces derniers tout en montrant bien que les usagers non-motorisés sont autorisés à passer sans restrictions, elle devrait exiger le retrait des panneaux C3 abusifs et les remplacer par des panneaux officiels de type F45b (impasse débouchante). Un panneau F45 est déjà présent à l’autre extrémité du chemin (côté Falaën), il suffit de le transformer en F45b en plaçant l’autocollant prévu à cet effet.

Auteur : Christophe Danaux – Tous à Pied