FLORENVILLE - Les Hayons : une propriétaire transforme une promenade en camp retranché
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FLORENVILLE - Les Hayons : une propriétaire transforme une promenade en camp retranché

Service : Participation et Revendication Publics : Particulier, Pouvoir public Thématique : Mobilité piétonne temps de lecture 3 min 37 sec

Le « Saut des sorcières » est un lieu-dit situé sur les hauteurs du village de Les Hayons, dans la commune de Bouillon. Cet endroit teinté de légendes offre un point de vue remarquable sur la vallée du ruisseau des Aleines, affluent de la Semois. Naguère, les habitants du village utilisaient le sentier vicinal N°52 qui reliait le village au lieu-dit « Le Maka » en passant à proximité du site.

© Sentiers.be

Dans les années trente, les parcelles, jusque là communales, sont vendues à un particulier avec une clause de déplacement du sentier le long de la limite nord du terrain ainsi qu’un élargissement de l’assiette à trois mètres. Un peu après, le propriétaire construit une villa sur le tracé du sentier initial. Or, l’alternative nord ne fut jamais matérialisée sur toute sa longueur et les habitants continuèrent à utiliser l’ancien tracé du sentier en contournant simplement la construction jusque dans les années soixante.

En 1966, à la demande des propriétaires, le bourgmestre de l’époque demanda au personnel communal de faire un nouveau sentier au sud de la maison. Ce sentier reliait ainsi directement le point de vue du « Mont de Zatrou » sur la vallée de la Semois au point de vue du « Saut des Sorcières ». Ce sentier est matérialisé en présence des propriétaires et rapidement balisé par le Syndicat d’initiatives de la Moyenne Semois. A partir de ce moment, les habitants et les promeneurs utilisent quotidiennement ce sentier et un banc est installé au « Saut des Sorcières ».

Et pendant quarante ans, personne n’a trouvé à redire sur la situation. Le nouveau sentier est repris dans de nombreux guides de promenades.

Jusqu’au jour où…

Le 5 septembre 2006, suite au décès de sa maman, la fille de la propriétaire soutenant que l’existence du sentier serait la cause d’un vol qu’elle aurait subi, demande purement et simplement la fermeture du sentier et l’enlèvement du banc et du balisage des promenades. S’ensuit une guerre des courriers et des mises en demeure entre cette dernière, la commune, le DNF, le Commissaire voyer, le Syndicat d’initiatives et un bataillon d’avocats.

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La commune de Bouillon et le Syndicat d’initiatives tentent bien de faire valoir leurs droits, à savoir que le sentier matérialisé au sud de la construction est bien utilisé dans le cadre d’un usage paisible, public, ininterrompu et non-équivoque depuis quarante ans impliquant, dès lors, une prescription acquisitive. Devant les courriers intimidants des cinq avocats de la propriétaire et le coût exorbitant des frais de justice, ils renoncent finalement à poursuivre la procédure.

Fait accompli

De son côté, jouant la carte du fait accompli, la propriétaire entrave par divers moyens le passage public sur le sentier. Certains utilisateurs du sentier ne se laissent toutefois pas intimider par ces obstacles et continuent à utiliser le sentier malgré tout. En mai 2008, cette persévérance pousse finalement la propriétaire à clôturer solidement une grande partie du domaine et combler l’entrée du sentier avec des terres et des plantations.

Depuis, contrainte de trouver une solution, la commune adhère au compromis proposé par la propriétaire : un « autre nouveau sentier », plus éloigné, abrupt et totalement dépourvu des attraits paysagers du sentier revendiqué par la population puisqu’il n’offre comme vue typique que deux rangées de barbelés de part et d’autre du cheminement.

Après avoir contacté M. Frère, l’Echevin en charge du dossier, ce dernier nous a assuré que les propositions de suppression officielle du sentier 52 et de création tout autant officielle du nouveau sentier seraient soumis à la population via la procédure d’enquête publique prévue dans le cadre des articles 27 et 28 de la loi vicinale.

Reste à savoir pourquoi la commune propose une suppression et une création simultanées alors que la procédure permet un simple déplacement ? Que faire si la population se prononce positivement sur le principe de suppression, mais pas sur le tracé alternatif imposé par la propriétaire ?

C’est à ce moment là que l’on pourra mesurer si la modification proposée rencontre bien l’intérêt général.

 

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Auteur : Christophe Danaux – Sentiers.be