Les chemins et sentiers protégés par les normes agricoles : retour à la case départ
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Les chemins et sentiers protégés par les normes agricoles : retour à la case départ

Service : Participation et Revendication Publics : Particulier, Pouvoir public Thématique : Trame Verte et Biodiversité temps de lecture 3 min 50 sec

L’avancée en matière de protection des chemins et sentiers publics tuée dans l’œuf en Wallonie pour l’année 2011.

Dans notre article du 28 mai 2010, nous nous réjouissions d’une avancée majeure en matière de protection des chemins et sentiers publics dans le cadre des Bonnes Conditions Agricoles et Environnementales (BCAE) en Wallonie. Le principe est que la Commission européenne tient à ce que les primes versées aux agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune soient conditionnées au respect par les bénéficiaires des principales législations sanitaires et environnementales.

En effet, le respect des biens et servitudes publics était une condition incluse dans la norme D1T0E5 – « Maintenir les particularités topographiques ». En quelque sorte, cela relève du bon sens élémentaire : octroyer moins d’argent public aux agriculteurs qui occupent sans titre ni droit le domaine public.

Le Royaume-Uni comme modèle

Le Royaume-Uni avait déjà montré l’exemple en instaurant une norme BCAE relative aux « servitudes de passage public » interdisant à l’agriculteur de « dégrader la surface d’un sentier, d’une piste cavalière ou de toute autre voie publique visible, et interdisant d’entraver sciemment la libre circulation sur ces voies ».

De plus, et c’est un élément surprenant, mais validé par la Cour Européenne de Justice dans le cadre d’un recours d’un agriculteur britannique contre la norme.

le Royaume Uni a inclus dans les normes BCAE des exigences concernant l’entretien des servitudes de passage public. Cela peut se faire, pour autant que ces exigences contribuent au maintien de ces chemins en tant que particularités topographiques ou aux fins d’éviter la détérioration des habitats.

Rappelons qu’en Wallonie, cette disposition avait fait l’objet, entre autres, d’un consensus entre l’administration et les organisations agricoles. Elle n’était pas aussi ambitieuse qu’au Royaume-Uni, mais constituait incontestablement un signal positif vis-à-vis de la société civile et de la défense du domaine public.

Wallonie : de l’espoir…

L’application de cette disposition pour l’année 2010 semblait poser problème et la FWA (Fédération Wallonne de l’Agriculture) signalait, à juste titre, qu’il ne pouvait y avoir d’effet rétroactif pour cette année-là car les agriculteurs n’étaient pas encore informés de la disposition.

Les autorités publiques semblaient avoir entendu cette revendication et ont proposé, à l’époque, de rendre cette disposition effective dès 2011, le temps d’informer les agriculteurs au préalable. Malgré ce contretemps légitime, tous ceux qui, au sein des administrations communales ou des associations, espéraient y voir un moyen de pression pour responsabiliser certains agriculteurs peu scrupuleux, restèrent confiants sur la volonté régionale de maintenir cette condition. Ils risquent de déchanter …

… à la déception

En effet, dans la notice explicative du formulaire de déclaration de superficie pour l’année 2011, les termes « toute usurpation des biens et servitudes publics » ont tout simplement disparus ! Ce qui nous ramène à la case départ et anéantit tous les espoirs des défenseurs du domaine public vis-à-vis des usurpateurs en milieu agricole.

Les autorités régionales prévoyaient comme référence, toute photo aérienne réalisée sur une période de dix ans maximum. La plateforme « Sentiers » a réagi par courrier en soulignant l’avancée en la matière, mais en se posant la question de savoir sur quelle base cette période était établie. Une période de trente ans n’était-elle pas plus indiquée pour cadrer avec la loi vicinale de 1841 ? La question reste posée et le souhait de la plateforme était d’être associée au débat. Ce qui ne semblait pas du tout être au goût de la FWA qui se considère comme l’unique interlocuteur valable en la matière, n’hésitant pas au passage, à interpréter la législation de manière très personnelle.

Finalement, le souhait de la plateforme « Sentiers » de participer au débat ne fut pas rencontré et seule la FWA a pu faire valoir sa position. Celle-ci se résume très simplement : malgré le consensus de départ, on supprime la référence à l’usurpation des biens et servitudes publics. Les agriculteurs ne veulent plus être perçus comme des ours sur les chemins, malheureusement la fédération qui les représente ne leur facilite pas la tâche…

Auteur : Christophe Danaux – Sentiers.be