Fils barbelés en bordure des voiries communales : À quelles distances doivent-ils être placés ? Que faire en cas d’accident ? Qui est responsable ?

Par un beau dimanche après-midi, vous vous baladez près de chez vous avec votre progéniture. Avec son petit vélo tout neuf, elle donne ses premiers coups de pédale sur le sentier du bout de la rue. Vous pensez qu’en dehors de la circulation, elle est en sécurité. Tout à coup, le marmot encore hésitant verse sur le côté et s’écrase contre la clôture de fils barbelés qui longe le sentier. Dans notre histoire, il s’en sort sans égratignures et vous avec une belle frayeur, mais tout de même …

Le scénario pourrait se répéter avec tout usager du sentier. Tomber sur des fils barbelés est sensiblement plus douloureux et potentiellement plus dangereux que de tomber sur une haie de charmes, voire un mur en briques. Le petit sentier que vous croyiez sécurisé se révèle un véritable couloir de la mort. Fini la promenade tranquille. Est-ce normal qu’il soit si étroit ? Quelles sont les distances légales à respecter ? Qui est responsable en cas d’accident ?

Des règles de distance à respecter

Ce que nous appelons communément « fils barbelés » est assimilé à ce que l’on appelle joliment une clôture de « ronces artificielles ». La distance règlementaire de ces clôtures par rapport à la limite des voiries communales est définie dans les règlements provinciaux1.

La clôture placée au ras de ce sentier au centre du village de Nalinnes peut mener à de graves conséquences en cas de chute ou même de simple frôlement.

La clôture placée au ras du sentier vicinal N°95 au centre du village de Nalinnes peut mener à de graves conséquences en cas de chute ou même de simple frôlement.

 

La distance est toujours calculée à partir de la limite de la voirie et non pas à partir de son axe central. Cela semble aller de soi, mais dans le cas des servitudes de passage2, il n’est pas inutile de le rappeler. Tout comme le fait que le fond3 appartienne à la commune ou à un particulier n’a pas d’importance. Le décret relatif aux voiries communales du 6 février 2014 rappelle d’ailleurs ce principe à l’article 2§8 : « Voirie communale : voie de communication par terre affectée à la circulation du public, indépendamment de la propriété de son assiette, y compris ses dépendances qui sont nécessaires à sa conservation, et dont la gestion incombe à l’autorité communale …».

Dans le cadre du décret relatif aux voiries communales, il est prévu de fusionner tous ces règlements en un seul règlement régional. Un arrêté d’application doit encore être pris en ce sens. Pour des raisons de sécurité évidentes, Sentiers.be espère que les 50 cm minimum comptés à parti des bords du chemin seront désormais la norme partout. En attendant, choisissez votre province !

Règlement provincial du Brabant-Wallon

Autorisation du Collège nécessaire : « Art.14.- Il est défendu de faire des ouvrages quelconques à une distance moindre de 4 mètres de la limite légale des chemins, avant d’en avoir obtenu l’autorisation du collège des bourgmestre et échevins. Ce collège, après avoir entendu le commissaire voyer du district, prescrit au besoin, notamment pour les plantations, les mesures propres à sauvegarder les intérêts de la voirie… »

Distance minimum : « … L’alignement ne peut être donné à moins de 2 mètres de la limite des chemins pour les plantations de haute tige et à moins de 0,25 m pour toutes clôtures de nature à empiéter sur le chemin ou à gêner ou entraver la circulation, telles que, par exemple, les haies vives et les haies en ronces artificielles. »

Règlement provincial du Hainaut

Autorisation nécessaire : « Art.23 – Quiconque voudra planter sur sa propriété, le long d’un chemin vicinal, devra préalablement y être autorisé par le Collège des bourgmestre et échevins, et se conformer aux conditions de cette autorisation… ».

Distance minimum : « Art.24 – … Dans le cas de l’article 23, elle fixera l’alignement à un demi-mètre de la limite du chemin pour les haies et à 2 mètres pour les arbres… Les clôtures en fil de fer armé de ronces sont assimilées aux haies. ».

Règlement provincial de Liège

Autorisation nécessaire : « Art.16 – Nul ne pourra faire aucune plantation, même partielle, aucun dépôt permanent ou ouvrage quelconque dans une zone de trois mètres de la limite d’un chemin vicinal, même sur sa propriété, sans en avoir obtenu l’autorisation par écrit du Collège des Bourgmestre et Échevins, qui pourra fixer également la hauteur en-dessous de laquelle il ne sera pas permis d’établir les seuils d’entrée des habitations ».

Distance minimum : « Art.19 – L’alignement sera fixé à deux mètres au moins de la limite du chemin pour les plantations d’arbres à haute tige, et à cinquante centimètres, au moins, pour toute espèce de construction ou de clôture de nature à empiéter sur le chemin ou à entraver la circulation, telles que, par exemple : les haies vives et les haies en ronces artificielles. Les arbres à haute tige ne pourront être plantés à moins de six mètres l’un de l’autre. »

Règlement provincial du Luxembourg

Autorisation nécessaire : « Art.107 – Nul ne pourra, dans une distance de deux mètres de la limite d’un chemin vicinal, même sur son propre terrain, construire ou reconstruire aucun bâtiment ou mur, de quelque nature que ce soit, planter des arbres ou des haies vives, « établir des clôtures quelconques » sans en avoir demandé et obtenu l’autorisation»

Distance minimum : « Art.109 – L’alignement sera fixé, s’il s’agit de constructions ou de reconstructions, de manière à ce qu’il puisse être bâti sur la ligne séparative de la propriété riveraine et du chemin ; il sera fixé à deux mètres au moins de la limite du chemin, pour les plantations d’arbres de haute tige, et à un demi mètre pour les autres arbres et les haies vives. » Attention, dans ce cas-ci, il n’est pas explicite que la clôture soit assimilée à une haie vive.

Règlement provincial de Namur

Autorisation et plan d’alignement nécessaires : « Art.19 – Aucune construction ou reconstruction, aucune clôture ou plantation ne peut être effectuée le long de la voirie vicinale sans que l’alignement n’ait été délivré au préalable par le Collège échevinal. La demande d’alignement est adressée par écrit. L’administration communale la transmet pour avis au commissaire voyer qui fait rapport au Collège échevinal dans les 15 jours. Celui-ci statue ensuite dans un nouveau délai de 15 jours. »

Distance minimum : « Art.17 – Il est interdit d’établir ou de maintenir le long des chemins et sentiers vicinaux des clôtures artificielles en fil de ronce, à moins de 50 centimètres des limites desdits chemins et sentiers. »

Le règlement de la Province de Namur est également le seul a aborder la question des clôtures électriques : « Art.18 – Indépendamment des conditions générales d’installation des clôtures électriques, les clôtures électrisées, le long des chemins et sentiers vicinaux sont placées à 50 centimètres au moins de la limite de la voirie. Elles peuvent toutefois être établies à la limite de la propriété privée, à condition d’être obligatoirement constituées d’au moins deux fils ou câbles dont un au moins n’est pas électrisé. Ces fils ou câbles non électrisés sont placés sur la face antérieure des supports (côté domaine public) sans saillie sur le domaine public et les fils ou câbles électrisés vers la face arrière des supports (côté propriété privée). »

Ce sentier très fréquenté reliant la gare d'Ham-sur-Heure au centre du village est insécurisant pour les usagers.

Ce sentier très fréquenté reliant la gare d’Ham-sur-Heure au centre du village est insécurisant pour les usagers et plus particulièrement pour les cyclistes.

 

En la matière, il n’est pas non plus inutile de consulter les Règlements généraux de Police relatifs aux sanctions administratives communales. En effet, certaines communes précisent également ces règles de distances telle la commune de Walhain, où il est dit à l’Art. 15 que « Les clôtures de haies vives ou en fil de fer barbelé seront placées en retrait de 0,5 m au moins de la limite légale de la voie publique ».

Sécurité et responsabilité

Généralement, la largeur d’un sentier est estimée à environ 1,2 mètres dans les atlas vicinaux. Soit la largeur minimum pour que les piétons puissent passer confortablement et se croiser. Si le sentier est bordé par des pâtures closes avec du fil barbelé, il faut ajouter 0,5 mètres de part et d’autre de la voirie, ce qui donne une ouverture de 2,5 mètres. Or, il est fréquent de voir cette ouverture réduite à 1,2 mètres, voire parfois encore moins avec des passages de quelques dizaines de centimètres !

Alors, en cas d’accident qui est en tort ? Dans tous les cas de figure, la commune est tenue d’assurer la sécurité des usagers sur toutes les voiries qui traversent son territoire. Selon les juridictions belges4, cette obligation impose à la commune de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir les accidents ; ce qui pourrait donc consister à obliger les riverains en infractions à respecter les règlements5. En cas d’accident, la commune peut donc être responsable ! Elle pourrait ensuite se retourner contre le riverain qui n’aurait pas respecté les distances obligatoires. Mais faut-il en arriver là pour obliger ses administrés à respecter la législation ?

Auteur : Christophe Danaux – Sentiers.be

Notes :

1. Sentiers.be a compilé les règlements provinciaux dans un document disponible ici : http://www.sentiers.be/content/uploads/2016/12/20160606-Règlements-provinciaux.pdf
2. La plupart des sentiers sont des servitudes publiques de passage mais sont bien des voiries communales comme le Décret relatif aux voiries communales du 6 février 2014 le stipule à l’article 2§1 : « voirie communale : voie de communication par terre affectée à la circulation du public, indépendamment de la propriété de son assiette, y compris ses dépendances qui sont nécessaires à sa conservation, et dont la gestion incombe à l’autorité communale …«
3. Fond = assiette de la voirie
4. Cour d’appel de Bruxelles – arrêt du 29 septembre 2002
5. Loi communale, Art.135§2 : « De même, les communes ont pour mission de faire jouir les habitants des avantages d’une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité dans les rues, lieux et édifices publics. »