Le Jaywalking, Kesako?
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Le Jaywalking, Kesako?

Publics : Particulier, Pouvoir public Thématiques : Mobilité piétonne, Sécurité routière temps de lecture 5 min 26 sec

Alors non il ne s’agit pas d’un des pas de danse de Michael Jackson, ni du titre d’une chanson d’Elvis Presley, ni du mari de Beyonce et vous pouvez danser le jerk (sur de la musique pop) mais ce ne sera pas encore ça.  Oui mais alors c’est quoi ?

Petite mise en contexte

Que ce soit pour rejoindre le trottoir d’en face, l’autre partie d’un sentier ou se rendre simplement de l’autre côté de la rue, il est parfois bien difficile de trouver un endroit sûr pour traverser ! Qui plus est, ce sentiment de sécurité est pleinement subjectif et varie grandement (en plus du contexte du à la vitesse des véhicules) d’un individu à un autre en fonction de son âge, son expérience en tant que piéton ou de sa connaissance du lieu.

Pour cette raison et afin d’orienter les piétons vers les meilleurs endroits de traversée, sont aménagés des passages piétons, trottoirs traversants et traversées suggérées qui sont d’ailleurs souvent plus que suggérés car il est obligatoire de les emprunter (pour rappel, le Code de la Route impose dans son article 42.4.1 : “Quand il existe un passage pour piétons à une distance de moins de 20 mètres environ, les piétons sont tenus de l’emprunter.”) . Pourtant, ces aménagements génèrent parfois de nombreux détours pour les piétons et la tentation est grande d’enfreindre les règles et de ne pas les emprunter. C’est ce que l’on appelle, attentiooooooon, suspeeeeeense, on y arrive : le « jaywalking » !  Comme vous vous en doutez, ce terme nous vient de l’anglais et signifie « traverser dangereusement une route à pied ».

À l’heure de la mise en avant de la marche comme mode de déplacement ces obligations/interdictions se justifient-t-elles encore vraiment ?  

Origines du Jaywalking

Le jaywalking est le fruit d’une politique délibérée du lobby automobile menée dans les années 1920 à l’encontre des piétons aux Etats-Unis. Il traduit la transition de chaussées destinées aux piétons où les autres usagers étaient tolérés, à un espace dévolu à la voiture où les piétons sont exclus de droit. Sont donc apparus les premiers passages pour piétons et par la suite les règles obligeant les piétons à les emprunter. 

En pratique, il s’agit d’une infraction au code de la route qui consiste à traverser une rue à un endroit non réglementé, c’est-à-dire sans utiliser un passage pour piétons, un trottoir traversant, ou ne pas respecter les feux. Cette pratique est souvent considérée comme dangereuse pour les piétons et les automobilistes car elle peut entraîner des accidents de la circulation. Dans de nombreux pays, le jaywalking est même passible d’une amende ou d’autres sanctions légales afin d’encourager les piétons à traverser les rues « en toute sécurité », et c’est le cas en Belgique.

Qu’en ont fait nos voisins?

Certains pays ont pourtant fait le choix de ne plus sanctionner les piétons qui traversent dans un endroit non réglementé ou de leur accorder la priorité partout même en dehors de ces traversées. En France par exemple, depuis 2018, il est précisé dans l’article R415-11 du code de la route qu’il est obligatoire de céder le passage à un piéton régulièrement engagé sur la chaussée, c’est-à-dire en mouvement vers la chaussée même s’il n’a pas encore quitté le trottoir. Si le feu piéton est rouge, et que le marcheur s’engage pour traverser, il y a lieu de lui céder également le passage. En revanche, les piétons sont toujours tenus d’emprunter les passages pour piétons situés à moins de 50 mètres1. Aux Pays-Bas, l’obligation pour les piétons d’emprunter le passage pour piétons si celui-ci est situé à moins de 30 mètres a été abolie en 1995. L’objectif était de simplifier les règles de circulation et donner plus de liberté à ceux qui se déplacent à pied. Aujourd’hui, un passage clouté n’est plus qu’un service rendu aux piétons qui sont autorisés à juger par eux-mêmes s’ils souhaitent l’utiliser, sans pour autant y être contraint2. C’est le cas également en Suisse ou au Royaume-Uni, où il est préférable d’emprunter un passage pour piétons lorsque celui-ci est disponible mais rien n’empêche de traverser en dehors de ces passages sans distance minimale.   

Et chez nous alors?

En Belgique, il est obligatoire d’emprunter le passage pour piétons si celui-ci est situé à moins de 20 mètres (30 mètres auparavant). Cela génère des zones de 40 mètres autour des passages dans lesquelles les piétons n’ont pas le droit de traverser ! Au-delà de cette zone, ils  peuvent traverser mais ils doivent impérativement céder le passage aux usagers circulant sur la chaussée. Et comme rien n’est simple, il existe deux particularités au code de la route :  

  • Les trottoirs traversants sont des trottoirs continus et de plain-pied qui traversent une chaussée. Les piétons ont les mêmes droits que sur les passages pour piétons mais ils ne sont pas obligés de les emprunter.
  • Dans les zones de rencontre, rues scolaires et rues réservées aux jeux, les piétons peuvent emprunter toute la largeur de la chaussée en ayant la priorité sur les autres usagers même au-delà des traversées aménagées sans pour autant gêner la circulation.

Pour Tous à pied, il est premièrement impératif de supprimer la limite des 20 mètres d’interdiction de traversée autour des passages cloutés car cela engendre parfois des grands détours pour les piétons. Cette suppression a été effectuée  aux Pays-Bas dans les années 1990 sans conséquences négatives sur l’accidentologie. Deuxièmement, il faut donner la possibilité aux piétons qui montrent leur intention de traverser sur la chaussée d’avoir la priorité sur les autres usagers même en l’absence de passage pour piétons comme c’est le cas en France.

Voilà, vous savez maintenant ce qu’est le jaywalking, cela ne vous rendra sans doute pas plus intelligent mais par contre si vous jouez au scrabble en anglais, vous pourrez peut-être le placer!  De rien!