1,2,3... piétons ! Ou comment évaluer les déplacements à pied en Wallonie ?
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1,2,3... piétons ! Ou comment évaluer les déplacements à pied en Wallonie ?

Service : Expertise et Consultance Publics : Particulier, Pouvoir public Thématique : Mobilité piétonne temps de lecture 4 min 29 sec

3,6 millions !

C’est le nombre de piétons en Wallonie, est c’est presque le seul chiffre que l’on connaît avec certitude. Il est vrai que nous nous retrouvons toutes et tous piéton·nes à un moment donné de nos déplacements. Que ce soit pour aller à la boulangerie du coin, prendre le bus, marcher jusque l’école ou même rejoindre sa voiture stationnée 200 mètres plus loin. Bref, une multitude de profils différents qui prennent leurs pieds au quotidien pour se déplacer, avec des besoins et des attentes spécifiques liés à l’âge, à l’éducation, au genre, à la situation physique, à la connaissance du terrain, etc. Pour autant, nous ne connaissons que très peu leurs caractéristiques et leurs habitudes, faute de moyens attribués pour quantifier et qualifier leurs déplacements. Néanmoins, l’enjeu est de taille car les piétons représentent la plus grande communauté d’usagers, loin devant les cyclistes et les automobilistes. 

Fort de ce constat, Tous à Pied s’est engagé en 2022 dans une recherche dirigée par l’institut wallon des statistiques (IWEPS), pour poser les bases d’un observatoire des modes actifs en Wallonie.

En Belgique,

c’est un sujet qui semble s’imposer de plus en plus dans les réflexions. À Bruxelles par exemple, Bruxelles Mobilité est en train de construire un observatoire de la mise en œuvre du Plan Good Move afin d’avoir une vision de la mobilité de manière transversale. Dans ce cadre, une stratégie de comptage a été définie dans les Vade mecum piétons. Par ailleurs, des enquêtes de satisfaction seront menées afin d’aboutir à un baromètre de la mobilité en région bruxelloise. L’idée étant de répéter l’action tous les 3 ans.  

En France, les enquêtes sur la mobilité standardisées nommées « Enquêtes Ménages-Déplacements » existent depuis longtemps. Celles-ci sont déclinées à différentes échelles comme les grandes villes, moyennes villes, les régions, etc. À l’échelle nationale, la dernière enquête date de 2018-2019. Ayant été réalisée en amont de l’épidémie de Covid-19, ses résultats (millésimés 2019) éclairent donc les comportements des Français juste avant la crise sanitaire. Il est à noter que le mode de transport principal est utilisé pour établir les statistiques. La marche à pied est donc représentée uniquement s’il s’agit du mode principal et est donc largement sous-estimée dans le cas de déplacements multimodaux (combinant plusieurs moyens de déplacement).  Pour remédier à ce problème, la Direction de la sécurité routière (ministère de l’Intérieur français) a demandé au Cerema (un centre de rechercher français) de mener des recherches concernant la création d’un observatoire de l’usage des modes actifs. Deux pistes sont évoquées pour le futur observatoire : le développement des comptages automatiques et l’utilisation des enquêtes de mobilité existantes couplées avec les recensements de l’INSEE (institut français des statistiques) afin d’estimer l’évolution de l’usage des modes actifs et d’automatiser cela année après année grâce aux données annuelles de l’INSEE. 

Et en Wallonie alors …? 

Différents indicateurs pourraient être créés en Wallonie pour évaluer la marche dans la mobilité quotidienne. Tous à Pied a relevé trois axes d’observation concernant les piétons.  

Premièrement, les opportunités pour marcher sont les éléments qui vont contraindre ou aider les piétons à évoluer dans l’espace public. Il s’agit de mieux cerner l’état actuel de la marchabilité (ou “potentiel piétonnier” qui désigne la capacité d’un milieu à faciliter les déplacements utilitaires à pied) du territoire wallon à travers un indicateur précis comme le nombre de kilomètres d’infrastructures dédiées aux piétons par rapport aux autres moyens de déplacement. 

Deuxièmement, étudier les comportements des piétons et leur évolution, mais aussi les éléments qui vont influencer positivement ou négativement ces comportements. Pour cela, nous proposons la mise en place d’un baromètre de la mobilité des piétons sous la forme d’enquêtes de satisfaction mais aussi la mise en place d’un dispositif régional de comptage des flux. 

Troisièmement, évaluer l’ancrage institutionnel des politiques de mobilité piétonne en analysant la place que l’on réserve à la marche et aux piétons dans les documents (stratégiques et opérationnels) d’aménagement et de mobilité actuels, dans la structuration des services et dans les budgets. 

Pour conclure,

pendant trop longtemps la priorité a été mise sur la compréhension et l’évaluation de l’usage du vélo comme moyen de déplacement au quotidien. Aujourd’hui, il est temps de réduire l’écart creusé avec la marche en effectuant des comptages, en mettant en place des enquêtes de grande envergure, en mobilisant les données existantes, en diagnostiquant nos espaces publics, et en mesurant l’efficacité de nos politiques publiques en faveur des piétons. Un chantier de taille dont le pilotage revient aux autorités régionales mais ne pourra se faire sans l’appui et le soutien des associations des usagers actifs.