Plan Air Climat Energie Wallon : l’avis de Tous à Pied
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Plan Air Climat Energie Wallon : l’avis de Tous à Pied

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Youpiiiii,

la marche et les piétons et piétonnes que nous sommes tous entrent enfin en ligne de compte dans le Plan Air Climat Energie 2030 ! 

C’est une petite victoire bien méritée que d’enfin prendre en compte les près de 4 000 000 piéton·es wallons qui représentent la communauté la plus importante parmi les gens qui se déplacent, loin devant les automobilistes et les cyclistes.  

Cependant après lecture et sans vouloir plomber l’ambiance,

on a une petite liste de choses non youpiiii qu’il nous semble importantes de relever. 

On commence par la base, le vocabulaire. Une bonne fois pour toute le mot mobilité douce doit être abandonné au profit de la mobilité active. Le concept de mobilité douce datant du début des années 2000 est dépassé dans cette notion peu claire et un peu gentillette. Depuis plus de 10 ans, c’est le concept de mobilité active qui détermine le mieux les modes actifs en désignant les modes de déplacement faisant appel à l’énergie musculaire, tels que la marche à pied et le vélo.  

Le PACE 2023 se base sur les objectifs de la stratégie FAST 2030 concernant le transfert modal pour le transport des personnes. Concernant la marche il est prévu de passer de 3% en 2017 à 5% en 2030. Il nous semble que cet objectif est fort peu ambitieux surtout au vu des statistiques disponibles. Premièrement parce que dans la plupart des statistiques disponibles actuellement, l’entièreté du trajet est attribuée au mode de transport principal, faisant passer à la trappe les déplacements piétons de début et fin de parcours (exemple : 500m à pied pour aller prendre le bus + 3km en bus + 300m à pied pour arriver à destination = 3,8km en bus au lieu de 3km en bus et 800m à pied). Pour être comptabilisé actuellement, un déplacement à pied doit se faire sur l’entièreté du trajet alors la marche est souvent pratiquée au début et en fin de déplacement que dans tous les cas celui-ci est présent au départ et à l’arrivéeEt deuxièmement, parce que la part modale de la marche varie fortement en fonction des territoires urbain, périurbain et rural. Par exemple, elle est déjà beaucoup plus élevée à Liège que les 3% évoqués. Il serait donc judicieux de chiffrer distinctement les objectifs. Les données actuelles ne reflètent donc pas la réalité. On risque de remplir facilement, cet objectif en mettant en place un système de relevés statistiques efficaces. On sera alors passé à côté d’une réelle augmentation de la parte modale de la marche. 

Si on se réjouit de la volonté d’application concrète du Principe STOP sur le terrain, nous nous interrogeons sur la mention d’un contrôle de la mise en place de celui-ci. Par qui ? Comment ? Quelles implications en cas de non-respect ? Il nous semble que la priorité doit être mise sur la formation des autorités publiques et autres maîtres d’ouvrage afin que cette notion devienne la base des réflexions de tous les projets d’aménagement.   

Concernant le Plan Wallonie piétonne, nous sommes rassurés qu’il fasse partie des outils impératifs à mettre en place pour favoriser des modes actifs. Quatre éléments sont cependant manquants : 

  • Pour qu’un trajet piéton soit réussi, il doit être sécurisé, efficace mais aussi confortable (faire des tunnels pour piétons hors trafic sera sûrement sécurisant et efficace mais fort peu confortable, l’objectif d’adhésion risque d’en souffrir). Or cette notion essentielle de confort passe complètement à la trappe (ergonomie, lisibilité des parcours, sanctuarisation des trottoirs, fonction de séjour prévoyant l’échanges, l’attente…) 
  • La notion d’inclusivité de l’espace public permettant à tout un chacun de développer le sentiment qu’une place lui est réservée dans l’espace public et qu’il s’y sent en sécurité. On pense particulièrement aux femmes, aux enfants, aux personnes âgées ainsi qu’aux personnes porteuses de handicaps. 
  • La réalisation de grandes campagnes de communication et de sensibilisation concernant la marche et ses bienfaits et de l’importance de celle-ci pour tous les trajets de moins de 2km. À l’image des efforts qui ont été et sont déployés pour le vélo, la marche doit elle aussi bénéficier des moyens de communication de grande envergure. 
  • Le rappel que la marche est l’élément central de toutes les formes de mobilité et particulièrement des transports en commun qui doivent impérativement être rendus accessibles aux piétons. Elle​ est en effet au minimum au départ et à l’arrivée de tous déplacements (prendre le train, le bus, le tram…). 

Concernant les PIMACI, il nous semble important de prévoir une répartition claire des moyens alloués à la marche et au vélo. 

Autre point étonnamment faible en ambition au vu des enjeux et objectifs fixés en matière de sécurité sur la route, le manque d’un objectif clair en matière de réduction de vitesse. Pour Tous à Pied, toutes les agglomérations (hors axes structurants restant à 50km/h) doivent passer à 30 km/h. Ailleurs (hors autoroute) la vitesse doit être limitée à 70Km/h. Cela doit devenir la norme et rapidement. Pas question de notion d’encouragement ou de sensibilisation sur ce sujet.  

Concernant l’électrification des moyens des transports et son corolaire d’augmentation de l’offre de bornes de recharge publiques pour les véhicules électriques, il est impératif que l’implantation de ces bornes ne se fasse en aucune façon sur les espaces dédiés aux piétons et plus particulièrement les trottoirs. Une attention toute particulière doit aussi être portée à l’emplacement des câbles qui ne doivent en rien gêner la circulation des piétions et surtout des piétons les plus vulnérables (enfants, personnes âgées, personnes porteuses de handicap…). On en profite pour rappeler au passage que toutes celles déjà placées qui ne respectent pas ces directives devraient être déplacées le plus rapidement possible. 

Enfin, un point central pour réussir le transfert modal est le changement de paradigme de la voiture particulière comme source de toutes les solutions. Informer, conscientiser et former doit se faire dès le plus jeune âge. Si des actions visant l’éducation à l’énergie et au climat sont prévues pour les publics scolaires, le même type d’actions doivent être prévues et mises en place en visant la mobilité active. Il est par exemple déjà assez incroyable qu’à l’heure actuelle, si une personne ne passe pas son permis de conduire, elle n’ait par ailleurs jamais été formée au Code de la Route qui concerne pourtant tous les usagers, piétons compris. 

Enfin, il n’en reste pas moins que la meilleure énergie c’est celle qu’on ne consomme pas. Par contre celle dépensée en marchant est bénéfique tant pour la santé, que l’économie et l’environnement.